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Embrun 1939-1945
20 mars 2020

L'entrée en guerre de l'Italie vue des Hautes-Alpes

10 juin 1940 Mussolini déclare la guerre à la France, malgré l’opposition du roi, de l'opinion et de ses généraux.

A Rome, Mussolini annonce sa déclaration de guerre

Mussolini a attendu que la France soit quasiment battue pour lui déclarer la guerre, 2 jours avant l'entrée des troupes allemandes dans Paris. L’Italie est affaiblie par ses dernières campagnes (Albanie, Ethiope, Espagne ) et Hitler lui refuse une aide matérielle.

Attendre le dernier moment : Mussolini pense ainsi ne pas à avoir à faire sérieusement la guerre. Il n'en a pas les moyens, d'où l'opposition de ses généraux.  Mais il veut profiter de la victoire allemande pour se voir attribuer de nouveaux territoires et récupérer des armements de l'armée française défaite.

Même si le front alpin a été dégarni pour tenter de contenir l'avancée allemande dans le Nord, même si on est en pleine débâcle, les forces ici sont plutôt favorables aux Français.

Galibier Manoeuvre en 1938

11 août 1938. Le général Gamelin passe en revue l’armée des Alpes au Galibier, à l’issue de grandes manœuvres. (Coll Musée des chasseurs)

L’opinion italienne n’approuve pas la guerre, encore moins ses frontaliers. Car l’histoire des vallées du Piémont, de Briançon, du Queyras ou de l’Ubaye est étroitement liée par un passé commun, des échanges économiques de survie et même des liens familiaux. Un berger piémontais est plus proche culturellement d'un paysan du Queyras que d'un paysan calabrais, d'un gondolier vénitien ou d'un ouvrier milanais.

Une histoire souvent commune

Dès le XIV° siècle, les habitants de quelques vallées dauphinoises sortent de la féodalité et achètent un statut fiscal et politique privilégié en créant la République des Escartons.  Au fil des traités, certaines de ces vallées deviendront italiennes.

Les Escartons

La république des Escartons. Au-delà des frontières qui changent avec les traités, ces vallées ont une histoire commune.

Dans certaines vallées, on parle français, comme à Torre Pellice qui est le lieu de refuge des Vaudois, adeptes d’un mouvement préfigurant le protestantisme. Ils ont fui la France et ses massacres d’avant la révolution, mais en gardent une certaine culture, et pour beaucoup parlent encore français.

Historiquement, ces vallées ont pu survivre grâce aux échanges économiques (commerce et contrebande).  Durant l’été, on venait du Piémont pour travailler dans le Queyras, en Ubaye, à Névache comme ouvrier agricole, berger, ou aider à la ferme. Et parfois on s’y mariait.

On retrouve ces bergers, ces faucheurs dans les Alpinis, l’armée italienne chargée d’attaquer ces vallées alpines qui les ont fait vivre. Seuls les chemises noires, les éléments fascistes, sont motivés.

Du côté français, on doit défendre son sol, sa famille ses biens.

Si les Italiens sont plus nombreux, ils sont moins bien armés et doivent monter à l'assaut de cols enneigés au mois de juin, mal chaussés avec des mules transportant le matériel, face à des Français abrités dans des forts munis de canons et mitrailleuses.

Fort Janus à Montgenèvre

Fort Janus à Montgenèvre. Faisant partie du système français de défense alpine, il fera obstacle aux armées italiennes.

Évacuation des vallées les plus proches de l'Italie

Le plan avait été préparé d’avance. Dès la déclaration de la guerre, il faut évacuer dans la nuit même les vallées du Queyras et du Briançonnais, suivant un plan prévu d’avance.

En l’absence du chef de famille souvent au front, le 10 juin 1940, les familles à qui on recommandait d’avoir 4 jours de vivres partent dans la nuit noire et pluvieuse. Quelques hommes sont chargés de mettre en sécurité les troupeaux qui finalement erreront. Les chiens sont abattus. Plus de 1 000 habitants du Briançonnais se dirigent vers la gare. 1 385 personnes du Queyras rejoignent Guillestre dans une grande cohue. Tous partiront en train pour l’Ardèche. 958 habitants de l’Ubaye se réfugieront en Lozère. (1)

A Abries, le chef Woehrlé de la brigade de gendarmerie, un solide Alsacien, raconte :

« De plus en plus la panique les gagne. Le maire de Ristolas, Mr Albert, me téléphone pour me signaler que tous les hommes sont partis, qu’il est resté seul avec tout le bétail de son village et il me demande d’intervenir. Il me faut donc trouver dans cette cohue, les gens de Ristolas que je finis par renvoyer (peut-être un peu brutalement) pour aller chercher le bétail. Les camions sont pris d’assaut au fur et à mesure qu’ils se présentent. Je vois une pauvre femme malade (je crois qu’elle relève d’un accouchement récent), couchée sur un matelas devant la poste et personne ne semble s’occuper d’elle. À grands coups de gueule, je fais descendre d’un camion des personnes encore jeunes pour faire de la place à cette femme » (1)

Une fois la population partie, on fait sauter routes et ponts vers la frontière.

Au retour en juillet, après la signature de la convention d’armistice, les familles retrouveront leurs maisons le plus souvent pillées (parfois même par les premiers arrivants comme à Abriès selon le chef de la brigade de Gendarmerie (1)) et sans troupeaux. Il faut survivre.

Les attaques italiennes contenues

Mussolini lance une dernière offensive, le 20 juin 1940, dans les Alpes.  Le 17 juin, Pétain a demandé l'armistice à l'Allemagne. Il espère profiter de cet armistice que va signer la France avec l’Allemagne (le 22 juin 1940) pour s'asseoir à la même table et partager le gâteau. Hitler refuse un armistice commun et les exigences de Mussolini (qui voulait s’emparer de la flotte et l’aviation française et annexer des territoires jusqu’à Oran et Alger) (2)

Les forces françaises contiennent les attaques italiennes qui pénètrent peu dans les Hautes-Alpes, ce qui réduit les prétentions de Mussolini pour le traité d’armistice signé le 24 juin 1940, à Olgiata près de Rome



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Bienvenue dans ce blog consacré à la vie embrunaise durant la seconde guerre mondiale : la vie quotidienne, les maquis, les acteurs, les bombardements, les victimes, les différents destins. De l'occupation italienne à la libération, le récit de ces 6 années à partir de documents, de mémoires tirés souvent à quelques exemplaires à compte d'auteurs et que l'on ne retrouve pas toujours sur Internet.

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